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La crémière navigue entre deux eaux
5 février 2011

Chez la dame de l'étang noir (suite)

Je vous ai laissés, esseulés et perdus sur les rives de l'étang noir. Le trajet c'est une chose, dans l'analyse, mais il y a bien un moment où il faut y aller, se mouiller (ah ah elle est bonne, hein,  se mouiller au bord d'un étang!), donc, trèves de tergiversations, et plongeons, dis-je!

Après avoir suivi un chemin sablonneux et pas mal cahoteux, vous garez votre voiture devant une maison: tuiles, murs blancs, boiseries bleu vif, terrasse en bois, très couleur locale. Une sculpture monumentale et pas terrible trône dans l'herbe. (La grande solidarité des rumeurs des analysés vous apprendra plus tard que ce serait l'oeuvre de sa fille. Si c'est une histoire famille, alors y'a prescription, n'est-ce pas ?)

Un panneau indique F ***P***, psychanalyste, et vous invite à sonner avant d'entrer dans la salle d'attente. Votre surmoi étant connaisseur des usages en cours dans notre société occidentale, vous obtempérez et allez jusqu'à respecter la consigne du papier (ça fait un peu cheep, je vous l'accorde) scotché sur la poignée intérieure précisant qu'il suffit de pousser la porte pour la fermer (là, votre esprit frondeur vous fait remarquer qu'elle n'a pas inventé le fil à couper le beurre, ça va souvent avec l'action de fermer une porte, que de la pousser, mais enfin bon, vous avez voulu venir, alors vous assumez).

La salle d'attente est assez petite: un canapé deux places blanc en tissu et bambou, une chaise pliante en bois, une table basse assortie au canapé, une chaise d'enfant. Un placard à portes coulissantes (il contient des couvertures et des couettes, mais en général on n'ose pas faire ce genre d'exploration les premiers temps, et ensuite, d'une part on l'a déjà fait, dautre part, on a déjà dépassé ce stade dans le transfert).

Au sol, du carrelage clair et un tapis de laine écru un peu tâché, malgré le paillasson qui devrait le protéger des chaussures boueuses (nous sommes à la cambrousse). Les murs sont peints de couleur saumon-orangé-que-j'en-mettrais-pas-chez-moi-de-cette-couleur-là-mais-bon-justement-j'suis-pas chez-moi..., le plafond est blanc. Il y a aussi un tableau, qui a changé l'an dernier, une espèce de chevalier juché sur une licorne a été remplacé par une dame habillée genre "la laitière" qui remplit un gobelet. On trouve aussi une grosse plante verte, une variété increvable qui n'en finit pas de mourir et renaître, et cherche à grimper à son tuteur sans y arriver complètement. Dans l'autre coin de la pièce un rouet, apparemment en état de marche (un symbole ? Le reliquat d'une vie antérieure baba cool "Larzac et brebis mes amies" ?)

Sur les portes du placard (cité plus haut) sont fixés par une pâte un peu grasse quelques avis: "toute séance non décommandée avant 48 heures sera considérée comme due", ou bien des annonces de congrès ou de signatures de livres par leurs auteurs dans des librairies branchées et lointaines. Il y a  aussi des aphorismes mal tapés sur une feuille A4 expliquant que le bonheur c'est de trouver un bon analyste (on n'est jamais mieux servi que par soi-même).

Sur la table basse, un ou deux livres plutôt vieillots pour enfants,  une avis vous invitant à éteindre votre portable, des programmes de formation pour les intervenants du milieu médico-social et autres éducs en tous genres, des dépliants de l'ADMD, des revues spécialisées avec des articles (indéxés par des post-it) et quelques ouvrages écrits par la propriétaire des lieux (On n'est jamais mieux servi ... voir plus haut).

Et vous commencez à attendre. Comme vous vous êtes arrangé pour arriver pile à l'heure, l'attente est de courte durée. Parfois la personne qui vous précède n'est pas encore partie. Vous entendez le murmure d'une voix, vous ne distinguez pas les mots, mais vous pouvez reconnaître si c'est un enfant, si il y a un dialogue, si c'est une conversation téléphonique...

Deux portes s'ouvrent et se ferment successivement, la voilà, c'est votre tour: elle vous dit bonjour, vous serre la main, et vous invite à la précéder dans un petit couloir. Sur la gauche, une salle de bain (la porte est en verre sablé), sur la droite le couloir se poursuit vers le reste de la maison, et, accroché en haut à droite du cadre de la porte de son cabinet, le portrait du grand ancètre, Sigmund.

Vous entrez.

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Commentaires
S
Soprano, ma Berthe ? "Nobody's perfect" (j'espère que tu apprécies à sa juste valeur la subtilité de l'allusion, non, non, ne me remercie pas! Contente-toi de m'admirer ;D)
B
Je te serai reconnaissante de ne pas faire courir de fausses rumeurs sur les sopranos. Non mais .
S
> Joye: Les Sopranos, je ne connais pas à la télé, mais je connais "IRL", une vraie mafia ces choeurs... Tu connais la blague ? Quelle est la différence entre une soprano et un terroriste? Réponse: avec le terroriste on peut négocier!!"<br /> Signé: "une alto fière de l'être" <br /> >Hermione: Un gigantesque pot de tarama! je crois ce soir il y aura comme un légère odeur marine dans la salle d'attente de la dame de l'étang noir. Excellente image! et désolée pour ta cuisine...
H
Tu me fais rire avec ton mur saumon-orangé. Ca doit être à peu près le même que dans ma cuisine, celui que j'ai regretté à la minute où il a été fait et qui me donne l'impression d'évoluer dans un gigantesque pot de tarama...<br /> Sinon la photo de Sigmund, je trouve que ça fait too much ;)
J
;o)<br /> <br /> (et bisou)
La crémière navigue entre deux eaux
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